Avec une croissance de plus de 5% par an en moyenne au cours des 10 dernières années, le développement du continent africain repose toujours sur la vente de matières premières mais aussi sur une consommation galopante. Bon nombre des pays voient émerger une classe moyenne qui ne cesse de grossir. L’internet se généralise. L’ e-commerce se développe et le paiement mobile explose. Naturellement, cette évolution s’accompagne d’une demande croissante des investisseurs pour les études en tout genre. Mais si le volume des études augmente, il n’en demeure pas moins que ces dernières sont caractérisées par certaines spécificités qui s’observent sur la plupart des pays d’Afrique francophone.
L’ABSENCE DE DONNÉES EN « LIBRE SERVICE »
Contrairement aux marchés occidentaux, les études « publiques » sont rares, autant sur le plan économique que sur le plan sociologique. Dans le meilleur des cas, elles sont limitées à quelques données statistiques de base (nombre d’habitants, sexe, âge) de certains pays. Dans le pire, elles sont périmées ou inexistantes. Disposer alors gratuitement ou à faible coût de données utiles pour créer ou développer son activité s’avère compliqué. Mieux connaître le consommateur passe nécessairement par l’initiation de sa propre étude. Cause ou conséquence, les informations relevant des études sont considérées comme une arme concurrentielle, d’où la mise en lumière d’une autre spécificité du marché…
LA GÉNÉRALISATION D’ÉTUDES AD-HOC AU DÉTRIMENT D’ÉTUDES SYNDIQUÉES
Fédérer les intervenants d’une catégorie donnée au sein d’une
même étude se heurte à de nombreux obstacles : déontologiques pour
certains qui ne peuvent concevoir de partager des informations avec la
concurrence, financiers pour ceux qui considèrent leur part à payer trop
importante, opérationnels enfin lorsque les intervenants ne
s’accordent pas sur le contenu précis desdites études.
S’il existe des exceptions, elles se manifestent plus dans
l’achat d’études a posteriori que dans une entente
préalable. Dans ces cas, le cabinet doit nécessairement prendre le
risque de mener l’étude à ses frais, informer les éventuels
prospects en toute transparence et espérer vendre les résultats aux
acteurs qui confirmeront leur intérêt. C’est le cas notamment de
certaines études d’audience des medias menées en Côte
d’Ivoire et au Sénégal.
LA CROISSANCE NOTABLE DE DEMANDES D’ÉTUDES DES PME
Même si les multinationales demeurent les principaux commanditaires, on assiste, surtout en Côte d’Ivoire depuis deux ans, à des demandes de plus en plus fréquentes de structures aux dimensions plus modestes agissant dans des catégories extrêmement variées principalement dans le domaine des services et du commerce de détail : immobilier, construction privée, restaurant, fastfood, boutique bio… Pour ces entités, comme pour la plupart des intervenants, l’étude concernée répond le plus souvent à la même préoccupation : évaluer le potentiel d’une activité, d’un service ou d’un produit à lancer.
LES ÉTUDES COMME PRE-REQUIS POUR SE LANCER
Alors que traditionnellement, l’ambition des études résidait le
plus souvent dans la volonté d’évaluer son activité face à la
concurrence, de mesurer le degré de satisfaction de ses clients ou la
performance de ses produits, de plus en plus de décideurs font de
l’étude la condition préalable à la décision de lancer ou non leur
activité ou leur innovation. La tendance au « marketing intuitif » tend
à s’affaiblir au profit d’études considérées comme de réels
outils d’aide à la décision.
Dans ce contexte, nous avons eu l’occasion au cours de ces deux
dernières années d’agir en ce sens pour deux enseignes désirant
créer des cinémas, deux entités souhaitant créer une nouvelle chaine de
télévision, un groupe de presse désirant lancer une nouvelle station de
radio, un industriel de l’agro-alimentaire envisageant de créer
une nouvelle marque de pâte alimentaire, une société immobilière
désirant proposer un nouveau concept de logement, un groupe automobile
voulant commercialiser un nouveau concept de véhicule à usage de taxi,
un industriel du bâtiment souhaitant lancer une nouvelle marque de
ciment, etc.
L’IMPORTANCE DU RÔLE DE CONSEIL
Dans la plupart des pays africains, les cabinets d’études sont confrontés à deux types de clientèle. D’un côté celle des groupes internationaux ou de leurs émanations, consommateurs traditionnels d’études qui ont l’expérience du domaine et qui disposent de ressources spécifiques dédiées à la spécialité. De l’autre, celle de sociétés locales y compris d’essence internationale pour qui les besoins révèlent des contours insuffisamment définis. Dans ce contexte, le cadrage de l’étude va dépendre de la recommandation du cabinet et de ses chargés d’études, qu’il s’agisse du mode de collecte, de la définition de l’échantillon, du périmètre de l’étude, voire même du type d’étude. En ce sens, la responsabilité du cabinet d’études prend une autre dimension et il appartient aux spécialistes d’avoir une approche aussi didactique que possible pour répondre à des demandes qui sont exprimées par des responsables peu familiers au monde des études.
LA PRÉVALENCE D’UN MODE DE COLLECTE TRADITIONNEL
Bien que les études de marché soient employées depuis plusieurs décennies
en Afrique aussi, les spécificités des pays influent sur les modes de
collecte.
Dans le cadre d’études quantitatives, le principal mode de
collecte demeure le face à face, notamment du fait de consommateurs
assez enclins à prendre le temps de répondre à un questionnaire dans la
rue mais également parce que la connexion internet à domicile fait
l’objet d’une trop faible pénétration pour des études online
récurrentes. On assiste toutefois à une augmentation des études CATI
dans quelques pays où la pénétration du mobile est importante. De plus,
la collecte en face à face évolue grâce à l’emploi de plus en plus
fréquent de tablettes tactiles et d’outils tels que Mobi-Survey,
qui permettent à la fois de supprimer les étapes de saisie, de
centraliser les informations recueillies et de géo-localiser les points
d’enquête.