En innovation, la voix du client (ou « voice of customer ») est centrale : le manque de connaissance des futurs utilisateurs d’un nouveau produit ou service et la mauvaise appréhension de leurs problématiques et besoins, représentent les principaux facteurs d’échec. En effet, de nombreuses études ont montré, tous secteurs d’activité confondus, que 80% des innovations échouaient en phase de développement et 75% ne passaient pas le cap de la première année de commercialisation (selon les données du « Petit Traité pour déjouer les 10 grands pièges de l’innovation »).
Il est donc essentiel d’intégrer la voix du client dans le processus de développement d’une innovation pour s’assurer qu’elle fasse sens pour ses futurs utilisateurs, que ce soit au moment d’explorer des opportunités d’innovation, de coconstruire des idées, d’évaluer leur potentiel de marché ou de diagnostiquer leur mise sur le marché.
COMMENT INTÉGRER DES INSIGHTS UTILISATEURS À CHAQUE ÉTAPE DU PROCESSUS D’INNOVATION ?
Le processus classique d’innovation invite à suivre un cheminement itératif qui, depuis la détection des opportunités (phase d’exploration) jusqu’à la mise sur le marché (phase de développement) en passant par l’idéation et l’expérimentation, permet de collecter et prendre en compte des insights utilisateurs à chaque étape.
Explorer. Si développer de nouveaux produits ou services fait
partie
des leviers majeurs de croissance pour les entreprises, encore faut-il
comprendre son marché pour innover dans le bon sens. Et détecter
des opportunités d’innovation porteuses de valeur n’est pas une
si mince affaire. Peu d’innovations à succès sont le fait de l’éclair de
génie d’une seule personne et les premières idées ne sont pas toujours
les bonnes. La phase d’exploration a ainsi pour but de collecter de la
connaissance sur son marché pour mieux l’appréhender. Les
études de marché classiques permettent de comprendre la structure
d’un marché, les acteurs présents, les propositions concurrentielles et
le potentiel disponible. Mais il ne s’agit là que de données
descriptives.
Pour aller plus loin, anticiper le futur d’un domaine d’activité ou
identifier des besoins insatisfaits, il est nécessaire de capter la voix
des
utilisateurs. Pour cela, de nombreuses méthodologies faisant appel à
des approches sociologiques, ethnographiques ou marketing
existent : des observations terrain ou entretiens individuels pour
identifier les pratiques et préoccupations des utilisateurs cibles, de
la
prospective des usages pour entrevoir des scénarii futurs, ou encore
de l’exploration de tendances auprès d’utilisateurs potentiels ou
d’experts pour identifier les signaux forts et faibles d’un secteur
donné.
Ces insights terrain ont d’autant plus de valeur qu’ils permettent
de
détecter des opportunités à innover qui sortent du spectre
classique de l’approche « techno push », c’est-à-dire de la
recherche d’amélioration technologique pure, en s’intéressant aux
aspirations, besoins et problématiques des futurs clients.
Imaginer. La détection de ces opportunités permet ensuite d’œuvrer à l’émergence de nouvelles idées de produits ou services, qu’il s’agisse d’améliorations de l’existant ou d’innovations de rupture. Ici, ce sont toutes les techniques créatives (séances d’idéation, brainstorming, sessions de créativité) qui peuvent être mobilisées pour transformer les premiers insights terrain en concepts. La méthodologie d’élaboration de concept innovant, par la réponse à un certain nombre de grandes questions structurantes (dans quel contexte s’inscrit le nouveau produit ? à qui il s’adressera ? à quoi il servira ? comment il s’utilisera ? …), permet d’esquisser les premiers contours d’une innovation en phase avec les attentes du marché. L’enjeu de cette étape d’idéation est ainsi de pouvoir décrire et formaliser l’idée imaginée (par du texte, des illustrations, des modélisations 3D, des scénarii d’usage, de la vidéo…), le tout en prenant en compte les éléments de l’exploration mais aussi en intégrant le futur utilisateur en tant que générateur d’idées et coconcepteur.
Expérimenter. Cette troisième phase, l’expérimentation, est l’une
des plus charnières dans le processus de développement d’un nouveau
produit ou service puisqu’elle permet de valider le potentiel
de l’idée imaginée auprès de ses futurs utilisateurs avant de
la développer et de la commercialiser. Il s’agit de venir confirmer
les hypothèses émises au préalable concernant les insights clients
et d’évaluer leurs perceptions de la nouvelle offre, leurs opinions et
ressentis.
Pour cela, les études d’usage sont l’approche la plus adaptée. Le
principe de ce type d’études est de pouvoir présenter le nouveau produit
ou service à ses utilisateurs potentiels (intermédiaires et/ou finaux),
au travers d’un mode de collecte qualitatif ou quantitatif (entretiens
individuels, focus groups, questionnaires en ligne…), sélectionné selon
les objectifs poursuivis et le degré de maturité du concept à tester.
Quel
que soit le mode de collecte et au stade du premier test utilisateur,
l’objectif est toujours d’identifier les éléments motivationnels
et les freins éventuels qui conditionneraient l’adoption de
l’innovation. En pratique, l’évaluation de l’acceptabilité est un bon
moyen d’évaluer la projection à l’usage des utilisateurs et donc
de déterminer les chances de succès d’une nouvelle offre. Son
évaluation repose sur quatre niveaux :
• L’adéquation de l’innovation aux savoir-faire des utilisateurs
(quel est leur intérêt spontané ? comprennent-ils le concept ?
l’associent-ils à des éléments qu’ils connaissent ? ...)
• L’adéquation aux pratiques existantes des utilisateurs
(s’imaginent-ils utiliser le concept ? comment ? pour résoudre
quels problèmes ? ...)
• L’adéquation à l’identité des utilisateurs (le concept est-il
compatible avec leurs valeurs professionnelles / personnelles ? se
sentent-il concernés par le concept ? ...)
• L’adéquation au contexte socio-économique des utilisateurs
(comment perçoivent-ils l’arrivée du concept sur le marché ? est-il
compatible avec leur environnement privé et/ou professionnel ?
avec leurs manières de vivre, de travailler ? ...)
En plus de l’évaluation de l’acceptabilité, l’évaluation de la désirabilité, c’est-à-dire l’analyse des émotions ressenties par les utilisateurs vis-à-vis d’un concept, est une approche complémentaire pour estimer les chances de succès d’une innovation.
Développer. Les retours utilisateurs collectés durant la phase d’expérimentation permettent ainsi d’identifier les points restant à améliorer pour que l’innovation soit la plus en phase possible avec les attentes du marché. Dans la phase de développement, l’enjeu est de lever les freins éventuels des utilisateurs, qu’il s’agisse de points de blocage liés au concept en tant que tel (comme sa compréhension ou son utilité perçue) ou à son usage (comme son intégration dans les pratiques des utilisateurs ou son ergonomie). Selon la marge de progression possible, le concept peut être retravaillé et retesté au cours d’une seconde étude d’usage (l’approche itérative est un classique du design thinking / design centré sur l’humain). Une fois le produit ou service validé par les utilisateurs, celui-ci prend sa forme définitive et l’objet d’innovation se concrétise (design, prototypage, production d’une présérie…). C’est à ce stade que l’utilisation réelle de l’innovation peut être également testée avec des utilisateurs : on parle alors de tests d’utilisabilité ou d’ergonomie, qui permettent d’apporter les derniers ajustements avant la mise sur le marché.
Ainsi, la voix du client peut et doit être prise en compte à chaque étape de développement d’une nouvelle offre pour mettre toutes les chances de son côté de commercialiser un produit ou service qui répondra aux attentes des clients et rencontrera le succès escompté.
QUELLE EST L’INFLUENCE DES AVANCÉES TECHNOLOGIQUES DANS CE PROCESSUS ?
Replacer l’humain au cœur de son projet innovant est une stratégie gagnante. Mais comment les nouvelles technologies viennent-elles s’intégrer ou au contraire concurrencer cette philosophie ?
Tout d’abord, la digitalisation massive représente une belle opportunité
de repenser les modes d’interaction avec les futurs clients d’une
offre. Cela s’est notamment matérialisé avec l’essor des plateformes
communautaires dédiées à l’innovation, qui facilitent l’accès aux
utilisateurs et permettent la création d’espaces virtuels d’échanges,
que ce soit pour réaliser des explorations, cocréer de nouvelles
offres ou mener des études d’usage. À titre d’exemple, la plateforme
communautaire yoomaneo by Ixiade combine toutes ces possibilités
en permettant à ses membres, particuliers, professionnels, experts ou
passionnés, d’échanger autour des futurs usages, de partager
leur vision mais aussi d’évaluer des projets d’innovation, le tout
en s’affranchissant des limites temporelles et géographiques.
Celle-ci rassemble des milliers d’utilisateurs dans des communautés
reflétant les grandes thématiques de la société (Modes de vie/Conso,
Sports/Loisirs/Bien-être, Univers digital/connecté, Energie, Mobilité/
Transport et Santé/Médecine) et s’articule autour de deux espaces :
un espace « discussions » où les membres peuvent échanger sur les
innovations et les futurs usages, et un espace « projets » dans lequel
ils sont amenés à évaluer des projets d’innovation dans le cadre des
études d’usage menées par Ixiade. Utiliser ce type de plateforme en
tant que mode de collecte présente bien plus d’avantages que la
simple utilisation d’outils numériques. En plus d’une collecte sans
limite
(de temps, de lieu) et asynchrone, yoomaneo combine les avantages des
modes de collecte individuels (entretiens) et collectifs (focus groups)
en permettant aux utilisateurs de se prononcer individuellement
avant d’interagir avec les autres utilisateurs, ce qui assure une
plus grande richesse des insights collectés.
En dehors du volet de la collecte d’insights, les nouvelles technologies et notamment l’avènement de l’Intelligence Artificielle ont aussi bousculé les pratiques d’analyse. Exit la prise de notes durant les entretiens et focus groups, les transcriptions mot à mot manuelles ou encore les fastidieux codages de verbatim à la main. De nouveaux outils, assistés par l’intelligence artificielle (générative ou non) permettent de gagner du temps sur ces tâches chronophages. L’un des exemples illustrant le mieux l’utilité de ces progrès est celui des analyses sémantiques. Dans le cadre de l’écoute de la voix des utilisateurs, tout ce qui peut aider à comprendre le sens de leur discours est donc intéressant : que ce soit pour identifier les thèmes abordés dans les verbatim d’une étude d’exploration ou pour attribuer des verbatim à des catégories prédéfinies. C’est le cas notamment lorsque l’on souhaite évaluer les chances de succès d’une innovation à travers son acceptabilité (la manière dont les futurs utilisateurs vont se projeter dans son usage). L’acceptabilité étant une méthodologie articulée autour de quatre niveaux, chacun articulé autour de différents critères, il est possible d’identifier des marqueurs spécifiques dans le texte pour catégoriser automatiquement les verbatim dans ces différents critères. C’est ce qu’Ixiade a fait en développant ses propres algorithmes d’Intelligence Artificielle et son outil de catégorisation et d’analyse des verbatim UXperia.
Que ce soit dans des étapes de collecte ou d’analyse d’insights clients, les nouvelles technologies permettent ainsi de gagner en efficacité et d’accélérer les processus de développement de nouvelles offres, tout en respectant la place centrale de l’utilisateur
ET EN PRATIQUE, COMMENT METTRE TOUT CELA EN PLACE ?
Suivre un tel processus d’innovation, centré sur la voix du client, oblige parfois à sortir de sa zone de confort, à penser autrement la manière de développer un produit ou un service. Et la sensibilité à l’expérience utilisateur ou encore les compétences en sociologie, marketing, linguistique ou design ne sont pas les mêmes d’une équipe projet à l’autre. En tant qu’agence d’innovation spécialisée en Stratégie, Etudes et Design, et centrée sur l’expérience utilisateur, Ixiade a pour mission d’accompagner les équipes projets sur l’une ou plusieurs des étapes de ce processus (explorer, imaginer, expérimenter, développer). À titre d’exemple, Ixiade a récemment accompagné le développement d’un nouvel outil destiné aux électriciens, visant à faciliter la manutention des câbles et fils électriques. Cet accompagnement a démarré avec une exploration des problématiques de ces utilisateurs au travers de focus groups (explorer), qui a permis d’élaborer le nouveau produit (imaginer) et sa proposition de valeur (comment ce produit allait répondre à ces problématiques). A ensuite été menée une étude d’usage pour valider l’intérêt de cette nouvelle solution et son acceptabilité (expérimenter), dont les résultats ont permis d’adapter le concept en travaillant sur les freins perçus par les futurs utilisateurs. Des tests d’ergonomie, avec un prototype fonctionnel, ont enfin été menés auprès d’électriciens (développer) pour apporter les derniers ajustements à la solution avant sa commercialisation.
Si l’équipe pluridisciplinaire d’experts Ixiade propose ses services sur l’ensemble des étapes de développement d’une nouvelle offre, elle propose également tout un ensemble de formations pour que les équipes projets puissent acquérir les connaissances et compétences nécessaires aux approches centrées utilisateurs mais aussi mettre elles-mêmes en pratique ces enseignements grâce à des « formations-action ». Par exemple, si une entreprise souhaite explorer son marché pour détecter des opportunités d’innovation, elle peut soit déléguer cette étude exploratoire à l’équipe Ixiade, soit être formée aux méthodologies appropriées (définition d’un plan de recherche, conduite d’un entretien individuel, analyse de contenus qualitatifs…) et être accompagnée à la réalisation de sa propre étude avec des résultats concrets à la clé.