Un mauvais questionnaire posé à 1000 personnes est certainement moins instructif qu’un bon questionnaire posé à 200 personnes seulement. La phase de rédaction est donc essentielle dans la réussite du projet d’enquête.
L’idée principale qui doit guider la conception du support d’enquête est la suivante : un bon questionnaire doit permettre un bon traitement. En effet, vous ne pourrez retirer de votre questionnaire que ce que vous y aurez mis. Les objectifs d’analyse doivent donc être pris en compte dès cette étape. C’est d’autant plus important que de simples précautions permettent d’obtenir un potentiel d’analyse décuplé. Ainsi, certaines méthodes statistiques comme l’analyse automatique de satisfaction qui calcule l’importance des critères à partir des seuls niveaux de satisfaction, repose sur la présence dans le questionnaire d’une question de satisfaction générale et de différents items pour les critères avec la même structure (d’au moins 3 réponses).
Oubliez cette question de satisfaction générale et vous ne pourrez pas calculer automatiquement l’importance de chacun de vos critères dans l’amélioration de la satisfaction de vos clients.
Rappelons que le contenu du questionnaire doit se concentrer sur les seuls objectifs assignés à l’enquête. Ce sont ces objectifs qui doivent guider la rédaction et vous faire éviter autant que possible de poser toutes les questions que vous auriez envie de poser parce qu’elles sont intéressantes. Un questionnaire ciblé sur un thème précis sera plus lisible pour les répondants, plus facile à administrer et, au final, plus efficace pour vous qu’un questionnaire fourre-tout qui vous donnerait des informations diverses mais pas forcément approfondies et exploitables.
La structuration du questionnaire
Un bon questionnaire doit contenir tous les éléments nécessaires à un traitement pertinent des données, dans une organisation visant à optimiser le recueil de réponses sincères de la part des personnes interrogées.
Les parties indispensables
Votre questionnaire doit comporter obligatoirement, en plus des questions d’opinions et de comportements relatives à l’objet de l’étude, une partie signalétique permettant de caractériser chaque répondant.
L’interprétation des résultats se basera notamment sur le croisement de ces deux catégories de variables, appelées respectivement variables à expliquer et variables explicatives.
En effet, vous pourrez comprendre les jugements et les comportements des personnes interrogées en fonction de leurs caractéristiques signalétiques.
Lorsqu’il s’agit de consommateurs, les questions signalétiques sont généralement le sexe, l’âge, la profession (CSP = Catégorie Socio-Professionnelle), la région, etc.
Lorsqu’il s’agit d’entreprises, vous pouvez demander le secteur d’activité, l’effectif, la région, etc.
Lorsque l’enquête est nominative, ces informations signalétiques sont parfois déjà disponibles dans les fichiers de la base de sondage. A moins d’avoir besoin de confirmation ou d’actualisation, il vaut mieux dans ce cas éviter de les redemander, tout en veillant à disposer sur le questionnaire des éléments qui vous permettront par la suite de récupérer et d’intégrer les données existantes dans les fichiers de données (code client par exemple).
Une organisation en entonnoir
Pour rassurer la personne interrogée et obtenir des réponses fiables, il convient de procéder en « entonnoir” en partant des questions les moins engageantes aux questions les plus personnelles et du général au particulier.
A moins d’avoir besoin de vérifier des quotas sur les variables signalétiques, celles-ci seront donc mieux situées en fin de questionnaire qu’en début.
Les questions d’introduction doivent être simples et claires. L’idéal est de commencer par des questions dichotomiques (qui admettent une réponse par oui ou par non) ayant une réponse évidente pour l’interlocuteur, en vue de mettre ce dernier en confiance. Ces questions “prise de contact” ne sont pas forcément utiles à l’objet de l’étude mais servent d’entrée en matière. On peut ensuite aborder plus sereinement les questions factuelles (habitudes, comportements) puis les questions d’opinions (évaluations, satisfaction).
En ce qui concerne ces dernières, il est conseillé de regrouper les différents critères à évaluer en tableaux, ce qui raccourcit le questionnaire à la fois sur papier et dans l’énoncé (on ne répète pas plusieurs fois le libellé de la question). Cela permet également à la personne interrogée de “caler” inconsciemment une échelle qui sera utilisée de la même manière pour tous les critères.
Nous vous conseillons de placer systématiquement, en amont de chaque tableau d’évaluation, une question globale, permettant de recueillir l’opinion générale de la personne interrogée sur le thème qui sera évalué critère par critère. Comme nous l’avons évoqué plus haut, cette question permettra, lors du traitement, de calculer l’importance de chacun des critères de détail. Attention : il est indispensable d’utiliser exactement la même échelle pour la question globale et pour les questions de détail.
A ce titre, plusieurs types d’échelles sont possibles (voir encadré ci-dessous). Nous vous conseillons d’utiliser généralement une échelle à 4 positions, en ayant recours au même adjectif dans les 4 propositions, précédé respectivement par tout à fait, plutôt, plutôt pas et pas du tout. Il est d’ailleurs préférable de présenter les propositions dans cet ordre (du positif au négatif).
Quel que soit le type d’échelles pour lequel vous opterez, il est fortement conseillé de le conserver tout au long du questionnaire (en faisant éventuellement varier l’adjectif), pour éviter toute ambiguïté au répondant.
La rédaction des questions
Maintenant que vous connaissez les thèmes à aborder et l’organisation générale de votre questionnaire, il est temps de vous atteler à la rédaction des questions et à la mise en forme de votre questionnaire.
La formulation des questions
Le questionnaire s’adresse avant tout aux personnes qui vont y répondre. Les questions qui leur sont posées doivent donc être claires et directement compréhensibles.
Pour cela, prenez bien soin de n’utiliser que des termes appartenant au langage courant et ayant une signification identique pour tous. Tout jargon technique doit être exclu. Si vous avez absolument besoin d’utiliser des termes techniques ou des mots complexes, il convient d’en donner une explication claire en accompagnement de la question.
La formulation des questions doit également être simple et claire. Il convient à ce titre d’éviter les formes négatives ou interro-négative, encore plus difficiles à appréhender. De même, toute ambiguïté ou imprécision seraient de nature à recueillir des réponses fausses. Ainsi, il est préférable de ne pas utiliser des termes comme “souvent” qui peuvent être interprétés différemment par les personnes interrogées. Utilisez plutôt des notions claires comme “Plus de 2 fois par semaine”.
De même, veillez à n’aborder dans chaque question qu’une seule notion à la fois. Une question qui demande l’opinion du répondant sur deux éléments sera automatiquement biaisée. La bonne démarche est de scinder cette question en deux pour avoir une appréciation claire et distincte sur chacun des éléments.
Les questions doivent être concises et complètes. La question doit être exprimée en une phrase courte, qui facilitera sa compréhension, notamment au téléphone. Elle devra proposer toutes les possibilités logiques de réponses pour éviter de mettre le répondant dans une impasse et lui faire sentir que le questionnaire ne concerne pas vraiment son cas (ce qui peut le pousser à “bacler” la fin du questionnaire, puisque ses réponses n’ont, dans ce cas, pas beaucoup d’importance).
Enfin, il est conseillé d’éviter les questions très engageantes personnellement : religion, argent, santé, sexe, alcool, conflits familiaux. Si de telles questions sont vraiment indispensables, il vaut mieux les aborder le plus tard possible dans le questionnaire.
Les différents types de questions
Selon l’information à recueillir, vous pouvez opter pour l’un ou l’autre des types de questions ci-après :
- Le type qualitatif
Les questions qualitatives sont les plus courantes dans les enquêtes. On propose une liste de réponses et la personne interrogée doit en choisir une ou plusieurs. Cette notion de réponse unique ou multiple doit d’ailleurs être précisée dans le questionnaire, pour éviter toute ambiguïté.
Ces questions qualitatives sont faciles à traiter. L’utilisateur obtient en résultat des tableaux de répartition simples ou croisés des répondants sur les différentes réponses proposées. De nombreux traitements statistiques sont également applicables facilement.
Toutefois, ce type de questions exige d’avoir prévu à l’avance toutes les réponses possibles à la questions, ou de recodifier a posteriori les réponses “autres” recueillies. Pour dépasser cette limitation, certains logiciels d’enquêtes comme Ethnos permettent de définir des questions qualitatives “enrichissables”. La personne interrogée peut choisir sa réponses parmi celles proposées ou donner une réponse nouvelle. A la saisie, ces réponses nouvelles seront ajoutées à la liste initiale et enrichiront ainsi la question.
- Le type numérique
Les questions numériques attendent une réponse chiffrée. Il peut s’agir d’une quantité, d’un âge, d’un prix, d’une note… Il est indispensable, pour obtenir une réponse valable, de bien indiquer l’unité attendue et, lorsqu’il s’agit d’une note, le sens retenu (1 pouvant être la meilleure note ou la moins bonne).
Attention : avant de retenir le type numérique pour une question, il faut se demander si la personne interrogée pourrait ou voudrait bien donner une valeur précise à cette question. S’il s’agit d’une note, ce sera sans doute le cas. En revanche, pour des questions comme l’âge, le revenu ou la fréquence d’un comportement, il est préférable de proposer des tranches. Il s’agira dans ce cas d’une question qualitative et non plus numérique.
Les questions numériques autorisent encore plus de traitements statistiques que les variables qualitatives (puisqu’on peut les traiter en numériques et les recodifier en qualitatives).
- Le type texte
Les questions de type texte correspondent aux questions complètement ouvertes, qui proposent au répondant de répondre librement à la question, par une ou plusieurs phrases.
Ces questions sont très souvent employées par les utilisateurs occasionnels d’enquêtes, qui pensent ainsi capter plus d’éléments en laissant la liberté complète de réponse aux personnes interrogées. Or on s’aperçoit vite, à l’usage, que des questions fermées bien posées apportent beaucoup plus d’éléments exploitables que ces questions ouvertes. Nous vous conseillons donc d’en faire un usage modéré, en les réservant notamment à un commentaire libre en fin de questionnaire.
- Les autres types
Il s’agit notamment des questions de type date, heure et calcul qu’il arrive d’utiliser dans les questionnaires. Si les deux premiers sont d’un usage évident, le type calculé, lui, correspond à une utilisation plus avancée, utile notamment dans le cas des questionnaires administrés et saisis en direct (au téléphone, en CAPI…). Il s’agit de questions qui prennent automatiquement des valeurs en fonctions des réponses données aux questions précédentes et qui peuvent permettre ainsi d’orienter la suite du questionnaire. Ainsi, on peut demander à une personne qui a donné des évaluations très mauvaises à une série d’items, plus de détail sur ce qui motive son appréciation très négative. Ce cheminement sera proposé automatiquement par le logiciel d’enquêtes.
Une présentation soignée
Si l’organisation et le contenu du questionnaire sont essentiels, sa présentation est également très importante, qu’il s’agisse de questionnaires auto-administrés ou de questionnaires administrés par des enquêteurs. Les premiers doivent absolument être clairs et attractifs pour les répondants, afin de les inciter à répondre. Les seconds doivent faciliter au maximum le travail de l’enquêteur en comportant toutes les indications utiles sur ce qui doit être dit et sur les différents cheminements conditionnels dans le questionnaire.
Dans les deux cas, les différentes parties doivent être clairement identifiées. Le questionnaire doit avoir un encombrement réduit, grâce à une mise en page optimisée qui devra s’attacher, dans le même temps, à garder la place nécessaire pour l’indication des réponses.
Le test du questionnaire
Malgré toute l’attention portée à sa conception, le questionnaire doit être testé en réel. Il faut le faire sur un petit échantillon, différent de celui constitué pour l’enquête pour ne pas « gâcher » des contacts bien identifiés, avant de passer à la phase d’administration. C’est une phase clé car rien ne peut remplacer la réalité du terrain. La qualité du traitement des données et des résultats en dépendent.